J'ai souvent été surpris par le degré d'ignorance de la plupart de mes patients concernant le fonctionnement de leur propre corps. Cette ignorance est génératrice de peurs, d'anxiété, le plus souvent exacerbées par une communication que je trouve parfois maladroite et anxiogène de la part des acteurs de santé publique. La mort est un risque, certes, mais vivre sans cesse dans la crainte de la maladie, d'une attaque virale, de problèmes cardiovasculaires… à la longue cela a un effet contre productif sur les êtres humains. Vivre dans la peur, c'est vibrer en permanence dans des énergies basses, négatives, c'est aussi la plupart du temps rendre certain un malheur à venir que l'on redoute depuis longtemps.
L'objectif numéro 1 d'une personne devrait être avant tout de rechercher un état de bonne santé, de bien être, et pour cela de percevoir directement les symptômes pour ce qu'ils sont le plus souvent : des signaux d'alerte visant à nous informer qu'il est impératif de modifier certaines de nos habitudes de vie. Dans la société traditionnelle, la compréhension de cette réalité avait pour conséquence immédiate une série de mesures naturelles : diète ou jeune, infusions de plantes, repos, apports de certains nutriments, cataplasmes, argile, etc. Ce savoir traditionnel s'est perdu dans la plupart des familles en particulier en milieu urbain, les gens ne savent plus du tout interpréter les signaux envoyés par leur propre corps.
Le médecin, qui autrefois était contacté après un échec de ces premières mesures simples de soins, est contacté actuellement en urgence à l'apparition de certains symptômes. Sauf que ce médecin, lui même, a perdu la plupart du temps ce savoir ancien pour décoder ces signaux d'alerte, il a été surtout instruit pour mettre des mots sur les différents maux du corps, à savoir, leur donner le nom d'une maladie.
Mais qu'es ce que la maladie, si ce n'est une forme de langage dont les racines culturelles sont acquises durant notre enfance par un effet mimétique inconscient ? Oui, on apprend à "tomber malade" comme on apprend ses tables de multiplication, et l'expression de cette maladie est très variable en fonction des pays et des croyances. On n'exprime pas du tout de la même manière son ressenti dans un pays méditerranéen, dans un pays nordique, en Afrique ou en Asie.
Face à cette incompréhension, le premier travail d'un médecin se doit avant tout de vulgariser la connaissance pour la retransmettre à ses patients, mais pas n'importe comment, il faut faire preuve de pédagogie dans le choix des informations et la manière de les délivrer. Le terme de thérapie cognitive n'est pas tout à fait exact, mais c'est ce qui se rapproche le plus, selon moi, de la réalité de la pratique.
Je l'ai déjà évoqué dans un autre article, un médecin est un enquêteur, il observe, il recueille des indices, il analyse toutes les données et si besoin il fait des recherches complémentaires pour affiner son diagnostic. Mais cette observation ne se limite pas à des données objectives, scientifiques, tout ce qui a trait à l'humain contient forcément une part de subjectivité, de ressenti ; il existe donc une part plus intuitive de l'analyse formant un ensemble parfaitement cohérent.
Le médecin doit communiquer à chaque patient, aux parents, les informations dont ils ont besoin à un instant T, afin de développer de nouvelles compétences sur leur santé. Le processus de guérison commence à partir de ce moment-là, pendant la consultation. Cette prise de conscience est salutaire, elle va entrainer des changements de comportements, de mode de vie, de la manière de percevoir et de réagir à leur réalité quotidienne. L'important est de toujours se montrer bienveillant et positif, et cela implique forcément une bonne écoute et donc un certain temps.
L'approche holistique, intégrative, se conjugue parfaitement avec la thérapie cognitive, qui, au lieu de se contenter de donner des recettes toutes prêtes (protocoles), clefs en mains, permet d'ouvrir une nouvelle porte sur un champ du possible en matière de santé. Cette prise de conscience, cet éveil, est le premier pas pour recouvrer une certaine forme d'autonomie sanitaire, et c'est une étape fondamentale vers le chemin de la guérison.
Prendre soin de quelqu'un, c'est avant tout lui faire prendre conscience qu'il possède en lui des capacités inouïes de vie et de guérison, et qu'il n'a jamais été une simple machine contrairement à ce que l'on cherche à nous faire croire.
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